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Dans l’arrêt du 21 janvier 2025, la chambre criminelle de la Cour de Cassation a défini la notion de Harcèlement Moral Institutionnel. Si cet arrêt est le premier à caractériser la notion en droit pénal, cela fait déjà plusieurs années que la chambre social a caractérisé cette notion. Cependant, la décision de la Haute Cour apporte une nouvelle vision de la chose.

Le Harcèlement Moral, qu’est-ce que c’est ?

Avant de parler de Harcèlement moral institutionnel, il est intéressant de parler de définir le harcèlement moral. Que cela soit dans le Code du travail, comme dans le Code Pénal, le harcèlement moral est caractérisé dès lors qu’il y a une notion de répétition dans les faits, amenant à une dégradation de la situation de la personne harcelée.

Plus précisément, sur le plan pénal, le harcèlement moral au travail est défini à l’article 222-33-2 du Code pénal : « Le fait de harceler autrui par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.« 

La notion de harcèlement moral institutionnel en droit pénal

L’arrêt rendu le 21 janvier 2025 par la chambre criminelle (pourvoi n°22-87.145) nous apporte donc la définition d’un harcèlement moral institutionnel. Reprenant les termes de l’article 222-33-2 du Code pénal, l’arrêt fait la distinction entre deux types d’agissements : ceux qui ont pour EFFET une dégradation des conditions de travail et ceux qui ont pour OBJET une dégradation des conditions de travail.

Dans un premier temps, les agissements qui ont pour effet la dégradation des conditions de travail nécessitent que les victimes de ces agissements soient clairement identifiés. Cependant, dans la seconde hypothèse, c’est donc l’élément intentionnel qui permet la caractérisation sans que les victimes soient individuellement désignées. En effet, ce qui a été retenu dans le cadre de cette affaire, c’est l’intention managériale derrière les agissements de France Télécom qui sont venus caractériser ce harcèlement moral institutionnel. Il est à noter que la chambre sociale avait posé comme condition que les victimes soient identifiées pour caractériser le harcèlement moral par les méthodes de gestion d’une entreprise (chambre sociale de la Cour de cassation, 10 novembre 2009, n°07-45.321).

Le Harcèlement moral institutionnel

Finalement, c’est l’arrêt de la Cour d’appel qui résume le mieux la notion de harcèlement moral institutionnel : « des agissements définissant et mettant en œuvre une politique d’entreprise ayant pour but de structurer le travail de tout ou partie d’une collectivité d’agents, agissements porteurs, par leur répétition, de façon latente ou concrète, d’une dégradation, potentielle ou effective, des conditions de travail de cette collectivité et qui outrepassent les limites du pouvoir de direction.« 

La chambre criminelle ajoute que la notion de harcèlement moral institutionnel vise : « les agissements visant à arrêter et mettre en œuvre, en connaissance de cause, une politique d’entreprise qui a pour objet de dégrader les conditions de travail de tout ou partie des salariés aux fins de parvenir à une réduction des effectifs ou d’atteindre tout autre objectif, qu’il soit managérial, économique ou financier, ou qui a pour effet une telle dégradation, susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité de ces salariés, d’altérer leur santé physique ou mentale ou de compromettre leur avenir professionnel. »

Quelles conséquences pour les entreprises ?

La notion de harcèlement moral institutionnel vise dont une situation où la santé physique et mentale des salariés doit être préservée. Ainsi, la Cour de cassation admet que les juges peuvent avoir un droit de regard sur la stratégie d’une entreprise et par la même occasion, venir limiter le pouvoir de direction de l’employeur. Cependant, ce contrôle reste limité à l’intérêt des salariés, qui doit rester le plus important pour les juges. L’arrêt évoque même que la dégradation des conditions de travail qui est susceptible de porter atteinte à la santé des salariés caractérise également l’infraction.

L’attention qui doit être portée aux méthodes de management actuelle requiert donc de s’interroger sur la meilleure approche à adopter. Il convient donc de se poser et de s’interroger sur sa pratique afin d’améliorer les conditions de travail pour les salariés, afin d’améliorer la productivité, mais aussi de prévenir la santé mentale et physique de ses salariés.

Il est donc nécessaire pour toutes les entreprise souhaitant mettre en place une nouvelle stratégie d’entreprise de prendre en compte l’aspect humain de telles mesures. Ainsi, les entreprises qui sauront tirer leur épingle du jeu dans le cadre de la gestion des ressources humaines pourront plus facilement s’adapter à un contexte qui met l’accent sur le bien-être au travail.